L’exercice d’une activité professionnelle est souvent source d’interrogations et de litiges. D’interrogations, car se pose la question de savoir si, de manière générale, une telle activité peut être exercée et dans quelles conditions. De litiges, car, dans une grande majorité des cas, l’exercice d’une profession est source de troubles de jouissance pour les autres résidents.

La possibilité d’exercer une activité professionnelle

Avant toute chose, il est indispensable de vérifier s’il est possible d’exercer une activité déterminée. Cela, seul le règlement de copropriété pourra nous le dire.

Clause d’habitation bourgeoise

Il s’agit d’une clause stipulant que les locaux ne pourront être occupés que bourgeoisement, c’est-à-dire réservés à l’habitation. Toutefois, elles admettent l’exercice de certaines professions, libérales notamment, voire l’exploitation d’un commerce, mais, dans ce dernier cas, un local spécifique doit y être affecté.

En fait, le principal problème de cette clause est son interprétation : doit-elle être restrictive ou, au contraire, relativement souple. Dans la pratique, les juridictions qui se sont prononcées sur le sujet ont alterné entre ces différents types d'interprétation, sans que l'on puisse forcément établir une règle claire privilégiant l'une plutôt que l'autre.

Ainsi, à titre d'exemple, une activité de bureau a été jugée incompatible avec la clause d'un règlement de copropriété qui ne tolère que les professions libérales (CA Paris, 4 février 1999) alors que l'installation d'un lieu de culte dans une résidence dont le règlement de copropriété n'admet que l'exercice de commerce a été autorisée (Civ. III, 20 juillet 1994, Ass. Foyer Culturel Myriam Zana c/ Synd. des copr. du 10, rue Barye à Paris).
Dans tous les cas, il convient d’être assez prudent avant de vouloir exercer une activité et de lire attentivement le règlement de copropriété.

Clause d’habitation exclusivement bourgeoise


Contrairement à la clause d’habitation bourgeoise, celle-ci prohibe toute activité professionnelle, qu’elle soit libérale ou commerciale. En fait, les lots sont exclusivement à usage d’habitation.

Par conséquent, si une activité commerciale est exercée malgré une telle disposition, il ne peut s’agit que d’une simple tolérance ne conférant aucun droit au copropriétaire concerné, le syndicat pouvant alors demander à ce que l’activité cesse.

Toutefois, il faut que la clause soit claire sur le sur le sujet sans quoi, elle sera requalifiée en clause d’habitation bourgeoise simple.

Clause interdisant l’exercice de certaines activités


Ce type de clause n’interdit pas l’exercice de toute activité, mais seulement d’activités bien déterminées. Cela signifie que celles qui ne sont pas expressément interdites peuvent être exercées.

Ainsi peut-on trouver des clauses interdisant les commerces qui en raison de leur nature, du bruit ou des odeurs qu’ils engendrent sont susceptibles de causer un trouble de jouissance aux résidants (restaurants…)

Si l'interdiction vise en général à préserver la tranquillité des occupants, il se peut qu'elle soit motivée uniquement en raison de caractère de haut standing de l'immeuble. Certaines activités, qui pourraient être tout à fait licites dans une autre résidence, deviennent alors illicites.

C'est le cas pour l'installation de sex-shops ou, dans un registre moins marginal, d'un centre de jeux informatiques collectifs (CA Paris, 3 février 2005, Synd. copr. 273/277, rue de Vaugirard et 2-4, rue des Favorites à Paris c/ SCI Vaugirard-Favorites et a.).

A moins qu’il ne soit possible, avant même l’installation du commerce, de faire une évaluation des troubles futurs causés aux copropriétaires (plan des canalisations…), il est nécessaire de vérifier si l’activité engendre effectivement des troubles de voisinage.

A titre d’exemple, un règlement de copropriété autorisait l'exercice de tout commerce à condition qu'il ne gêne pas les autres copropriétaires par les "trépidations, le bruit, l'odeur ou la chaleur". L’installation d'un commerce alimentaire avec cuisson a pourtant été validée, car aucun de ces troubles n'était caractérisé (Civ. III, 31 mars 2004, Ghattas c/ Synd. des copr.du 31 rue Fontaine à Paris).

De même, le syndicat ne peut interdire une activité si aucun inconvénient anormal n’est causé au voisinage. A contrario, et bien que cela puisse paraître paradoxal, cela veut surtout dire qu'une activité, pourtant autorisée par le règlement de copropriété, peut être interdite lorsque son exercice cause un préjudice (bruit, odeur…) aux copropriétaires.

Clause imposant l’exercice d’une activité déterminée


De nombreux règlements de copropriété précisent que seule une activité professionnelle déterminée, le plus souvent commerciale, peut être exercée.

La légalité de ce type de clauses est sujette à controverse et, à l’heure actuelle, le débat n’est toujours pas tranché par la jurisprudence. Par souci de précaution, il est donc préférable d’en rester à l’activité stipulée dans le règlement de copropriété.

Clause de non-concurrence


Il s’agit de la clause qui interdit à un copropriétaire d’exercer une profession libérale déjà pratiquée dans la copropriété, ou d’ouvrir un commerce vendant des articles similaires à ceux vendus par un autre copropriétaire.

Il peut s’agir, par exemple, de la clause qui précise qu’un médecin ne pourra s’installer qu’après l’accord de celui qui y exerce déjà sa profession. De telles dispositions sont illicites, car elles entravent la liberté des copropriétaires.

Les troubles de voisinage liés à l’exercice d’une activité

Si une activité professionnelle peut être autorisée, il n’en demeure pas moins que son exercice ne doit pas troubler la tranquillité des autres occupants, que ce soit par des bruits, odeurs…

Ainsi, à titre d'exemple, l'exploitation d'une boulangerie, même autorisée par le règlement de copropriété, occasionne des bruits nocturnes qui excèdent de beaucoup la mesure de ce que les usages peuvent obliger à supporter entre voisins. L’exploitant n’ayant pas réalisé les travaux permettant d’atténuer ces troubles, il a dû indemniser les copropriétaires et cesser son activité (Civ. III, 20 février 1973).

Les troubles peuvent également résulter d’une atteinte aux bonnes mœurs. Tel est le cas pour la réception d'une clientèle masculine à laquelle il est fait appel par voie de publicité écrite ou téléphonique (CA Paris, 25 mai 1987)

Les droits et obligations du copropriétaire

Dès lors que l’activité est autorisée et qu’elle n’est pas à l’origine de troubles de voisinage, le copropriétaire a, sur son lot, les mêmes droits que n’importe quel autre copropriétaire.

Il est donc libre de louer son local commercial à une tierce personne ou de procéder à des aménagements internes si cela est nécessaire. Bien évidemment, une autorisation préalable de l’assemblée générale sera nécessaire s’il porte atteinte à des parties communes (mur porteur…)

Deux cas peuvent toutefois donner lieu à discussion et faire l'objet de litiges : la pose d'enseignes professionnelles et la domiciliation d'entreprise.

Les plaques et enseignes professionnelles


Une question se pose fréquemment, à savoir celle de l’installation de plaques professionnelles ou d’enseignes publicitaires.
Certaines juridictions ont estimé que l’installation d’une plaque professionnelle ne nécessitait pas forcément une autorisation de l’assemblée générale dès lors que l’exercice de la profession est autorisé et que l’apposition de ladite plaque ne nuit pas à l’esthétique de l’immeuble.

Mais, là encore, par mesure de sécurité, il peut être préférable de demander une autorisation de l’assemblée générale, laquelle statuera à la majorité de l’article 25 puisque la plaque affecte l'esthétisme et l'aspect extérieur de l'immeuble.

En ce qui concerne l’enseigne, de par ses caractéristiques (taille, enseigne lumineuse…), il est nécessaire de solliciter une autorisation de l’assemblée générale (toujours à la majorité absolue)

La domiciliation d’entreprises


Qu’il s’agisse de clauses d’habitation bourgeoise ou exclusivement bourgeoise, elles interdisent chacune l’exercice d‘une activité commerciale dans un local d’habitation. Pourtant, cela peut être problématique, notamment au regard de la domiciliation d’une entreprise.

Ainsi, dans le cas où le commerçant ou l'artisan ne dispose pas d'un établissement, il peut, à titre exclusif d'adresse de l'entreprise, déclarer celle de son local d'habitation, cette déclaration n'entraînant ni changement d'affectation des locaux, ni application du statut des baux commerciaux, et valant pour une durée illimitée.

Par ailleurs, l’article L. 631-7-3 du Code de la construction et de l’habitation dispose qu’une activité professionnelle, y compris commerciale, est autorisée dans une partie d'un local à usage d'habitation, dès lors que l'activité considérée n'est exercée que par le ou les occupants ayant leur résidence principale dans ce local et ne conduit à n'y recevoir ni clientèle ni marchandise.

Or, les textes sont muets sur la compatibilité de la domiciliation d’une entreprise avec une clause d’habitation bourgeoise. A priori, la clause devrait s’appliquer mais, rien n’est certain, la jurisprudence ne s’étant pas encore prononcée sur le sujet.

Parallèlement à cela, s’il s’agit d’une simple domiciliation et que le copropriétaire ne reçoit à son domicile, ni marchandise ni clientèle, on peut difficilement parler d’activité commerciale. Et si aucun trouble de voisinage n’est causé, on peut se demander quel préjudice le syndicat des copropriétaires peut mettre en avant pour interdire la domiciliation.

Vous trouverez des informations complémentaires dans tout sur le syndicat de copropriétaires